Nous avons tous eu le loisir de chanter, ou du moins, d'écouter des chansons, tant le chant est un réel besoin pour exprimer nos sentiments et refléter notre vie intérieure.
La musique est la discipline artistique la plus accessible, en comparaison avec la peinture, la sculpture, la littérature... et chanter est surement un loisir simple mais passionnant, au point de devenir l’activité artistique la plus populaire.
Chanter, c'est parler en musique
La musique chantée est une forme artistique associant le langage et la musique.
A la base, le langage est un moyen indispensable pour informer, communiquer, partager avec les autres ses idées et ses sentiments. Et le chant a dû exister très tôt, peut-être juste après le langage car c'est la manière la plus efficace pour envoyer ses intentions directement dans l'esprit de son interlocuteur.
En effet, selon ce que nous voulons exprimer, nous utiliserons notre voix de manière différente : triste, en colère, plaintive ou solennelle,... Dans la voix, l'intonation joue un rôle essentiel pour capter l'attention de l'auditeur.
En effet, selon ce que nous voulons exprimer, nous utiliserons notre voix de manière différente : triste, en colère, plaintive ou solennelle,... Dans la voix, l'intonation joue un rôle essentiel pour capter l'attention de l'auditeur.
Pour vendre, pour accueillir ou pour séduire, la voix sera agréable et invitante (on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre, n'est-ce pas ?), tout comme le mendiant doit toucher la corde compatissante des passants pour arriver à ses fins (faims?).
Si le chant est une parole musicale, le poème est une prose mélodieuse.
Je m'en souviens encore, qu'à l’école quand j’étais petit (il y a bien longtemps), je l'avais appris à mes dépens. J’étais appelé au tableau et j'avais récité d'une seule traite un poème que je connaissais par cœur, mais comble de l'ironie, je n'avais obtenu qu'un petit 6 sur 10. Ce jour là, j'avais compris qu'un poème a une "âme" qu'il faut savoir "lire" et interpréter.
Et depuis, j'ai toujours essayé d'appliquer cette ''vérité" apprise. Pour écrire, que ce soit une prose ou un poème, je prends particulièrement soin de la musicalité pour que l'œuvre soit mélodieuse (au moins harmonieuse) à la lecture, et je change les mots, si besoin est. Pour moi, les rimes ne sont pas le seul moyen de créer la musicalité du poème (le propre de la poésie dite "libre" ?)
Ainsi donc, savoir parler, c'est savoir chanter, et l'intonation est le trait d'union entre le parlé et l’écrit, conduisant la parole à la poésie et au chant.
Le chant dans la culture vietnamienne
Le chant au Vietnam a pris source puis s'est développé à partir de l'art de la chanson populaire, si riche, si colorée, et chaque région, à chaque époque, a ses spécificités, ses propres formes d'expression.
Nous pourrions dire que la chanson populaire et les "proverbes chantés" (ca-dao) sont deux jumeaux qui, à partir de mélodies lyriques sans artifices, sont entrés ensemble dans la musique pentatonique, dans des rythmes plus multiformes avec le théâtre populaire (hát chèo), le chant religieux (chầu văn), la poésie, le théâtre rénové (cải-lương)... Ils sont entrés dans l’émotion du peuple pour y rester à jamais.
Chaque fois que j’écoute une "chanson alternée" (quan-họ) de la région Bắc-Ninh, je suis toujours pris d'une étrange émotion, quelque chose qui viendrait des racines profondes pour m'atteindre jusque dans la moelle des os.
J'ai toujours aimé la chanson traditionnelle, surtout celle du Nord-Vietnam. Et pour cause, je suis né à HaNoi mais n'y suis resté que trois ans et j'en garde toujours un souvenir nostalgique. Probablement que d'ici ma mort, je n'aurai plus que la langue et la musique traditionnelle pour revenir aux sources. Hélas.
Nous ne pouvons pas non plus passer sous silence le chant des berceuses, car les premières douces mélodies que nous avons entendues, depuis le ventre de nos mères sont bien celles-là.
Je me rappellerai toujours les berceuses que me chantonnait doucement ma mère. Mais aussi des chansons (françaises) que me chantait mon père, telle que ce poème de Paul Verlaine :
Le
ciel est par-dessus le toit
Si
bleu, si calme
Un
arbre par-dessus le toit
Berce
sa palme...
Et depuis, toutes ces berceuses, je les ai rechantées à mon fils, puis à mon petit-fils.
Par ailleurs, une caractéristique de la langue vietnamienne est d’être monosyllabique mais polytonale (cinq accents tonals et un ton sans accent). Ceci fait de chaque mot une note de musique et de chaque phrase une mélodie, surtout si la personne qui les énonce est une charmante jeune fille. Nous les hommes, combien de fois avons nous succombé au charme de cette musique ?
Le plaisir de chanter
La voix est un instrument de musique vivant que nous avons tous en nous, en permanence. Avec ce précieux instrument, nous sommes toujours prêts à jouer de la musique le plus facilement du monde. (D'ailleurs, de quel autre instrument pourrions nous jouer sous la douche ?)
"Le chant est la voix de l'âme" et chanter est devenu un besoin, besoin d'ailleurs facile à satisfaire.
Le chant religieux permet aux croyants de se rapprocher de Dieu, les paysans chantent dans les champs pour oublier toute fatigue, les villageois participent à des joutes chantées lors des festivités collectives et les jeunes gens utilisent le chant pour se courtiser...
Dans l'Histoire des Etats-Unis, la musique chantée a permis aux esclaves noirs de survivre à leurs misères et de conserver leur unité et leur culture. D'une certaine façon, plutôt que de serrer les dents, ils ont préféré ouvrir la bouche pour chanter et alléger leurs souffrances ?
Ma mère adorait chanter et je l’écoutais souvent. Elle chantait tous les jours, ce qui lui plaisait, ce qui lui passait par la tête, et aussi des berceuses pour nous endormir. Elle chantait les chansons de son époque, tout doucement, comme pour ne déranger personne, juste pour elle-même.
Je me demande encore si elle chante par plaisir ou simplement pour voir la vie moins dure. Petit, je ne comprenais pas grand-chose au monde des adultes, surtout que j'ai quitté le berceau familial à dix-huit ans, mais je sais que pour une femme, entrer dans une famille (nord-) vietnamienne n'est pas une sinécure, loin de là.
Quoi qu'il en soit, ce qui est passé est passé et maintenant que ma mère a dépassé les quatre (fois) vingt ans, je ne peux que lui souhaiter une bonne retraite bien méritée.
En ce qui me concerne, j'ai toujours eu la passion de la musique (même si je ne suis pas forcement doué). Dans ma jeunesse, j'ai été nourri à la musique de ma mère mais aussi à celle de mon époque, c'est-à-dire le yé-yé français (Françoise
Hardy, Christophe, Johnny Hallyday...), la Pop Rock anglaise et américaine (Beatles, Rolling Stones, Bob Dylan...).
Plus tard, loin du pays et de la famille, je m’étais acheté une guitare acoustique puis armé de quelques accords, j'entrais "fièrement" dans le monde de la musique. Comme tout autodidacte qui se respecte, j'ai bien vite plafonné et je ne suis en fait arrivé qu'à m'accompagner sur des chansons plutôt faciles (Trịnh Công Sơn, Lê Uyên Phương...). Puis j'ai abordé les chansons traditionnelles des trois régions du Vietnam, les chansons patriotiques (Vietnam, Vietnam...) dans le cadre des activités culturelles estudiantines, la musique d'avant-guerre... Depuis mon arrivée aux Etats-Unis, j'ai accompagné ma femme dans ses tours de chants et j'ai balayé plus large avec la musique française (beaucoup), américaine (très peu) et également la musique pour danser...
A ce stade, j'attrape soudain des sueurs froides à l'idée qu'à côté du "chemin musical" suivi par ma femme, le mien semble n'être qu'un sentier battu, une ruelle, une impasse. En effet, si sur scène ma femme est une fleur, je ne suis que le vase destiné à valoriser la magnificence de la fleur. A bien de la chance, une famille où la femme dépasse l'homme, parait-il.
Savoir parler, c'est savoir chanter, surtout depuis que Monsieur Inoue Daisuke a inventé le karaoké (de kara = vide, et oke = orchestre) afin que tout le monde puisse chanter sans le besoin d'un orchestre. Et depuis, combien de talents, jeunes et vieux, brusquement sont devenus chanteurs / chanteuses, du moins à la maison ou bien encore dans les karaoké bars. Cette vogue s'est bien développée depuis, même si elle a pu occasionner quelques menus incidents, du genre "rixes" entre candidats à propos des tours de chants ou des performances vocales.
Une fois, dans un karaoké bar, j'ai pu entendre un voisin de table grommeler en direction du "chanteur" qui officiait sur scène :
- Mon Dieu, comment peut-il oser se produire en public avec une voix pareille ? Quelle torture pour les oreilles. Et en plus, un medley afin de chanter encore plus.
Je pense au contraire que dans un karaoké bar, les services offerts étant des tours de chants pour amateurs, tout client y a tout simplement droit.
Je repense à un de mes amis, passionné de karaoké mais à qui la femme et les enfants ont imposé l'usage des écouteurs pour la tranquillité de tous. Il a fini par y renoncer.
Chante, mon ami, chante et colore la vie.
L'art du chant
Peu importe la bouteille, pourvu qu'on ait l'ivresse. Que l'on chante bien ou pas, chanter est toujours un plaisir. Mais pour un passionné, c'est nettement plus agréable quand on chante bien. Récemment une jeune chanteuse, pas vraiment professionnelle mais que l'on peut souvent écouter lors de spectacles dans la région, nous avait contactés. Elle va avoir prochainement deux tours de chants et aurait besoin de notre aide afin de, pour utiliser ses propres termes, "emmener son chant à un autre niveau".
En effet, cela peut paraître évident mais la musique à écouter est destinée aux oreilles et à l’âme de l'auditeur, alors que la musique pour danser vise les jambes et l’énergie du danseur, et de ce fait, elles font appel à des techniques différentes.
Même à l’intérieur des chansons lentes, certaines chansons sont légères à chanter, là où d'autres font appel à plus de passion, voire plus de "déchirement" pour toucher directement l’émotionnel de l'auditeur.
Dans toute discipline, Tennis ou Golf, musique ou danse..., nous devons atteindre un certain niveau pour vraiment en jouir (à ce titre, le tennis est pour moi plus un exercice physique qu'un véritable hobby).
Certains adorent chanter et voudraient bien progresser mais ne savent pas trop comment. Les aficionados du karaoké sont habitués à voir défiler les paroles sur l’écran et n'ont ainsi jamais appris à chanter en rythme ; de la même manière, ceux qui se font accompagner au piano ne chantent plus que ad libitum, sur la musique omniprésente du piano.
Ou encore, certains se plaignent de la faiblesse de leur voix ou de leur manque de souffle alors qu'en fait, ils ne savent simplement pas contrôler leur respiration. Car comme disait F. Lamperti, le maître de file de la nouvelle école de chant italienne, "L'art du chant, c'est l'art de la respiration".
Il fut un temps, à Paris, parce que je voulais progresser, j'avais suivi deux stages de chant, l'un de Jazz, l'autre de chants yiddish. (En fait, le genre de musique m'importait peu, vu que je voulais juste acquérir quelques bases et les travailler après).
Le chant est bien un art comme un autre.
Pour ma part, tant que je respirerai, je chanterai, car tant que je chanterai, je serai encore vivant.
Un jour sans musique est comme un jour sans soleil.
N'est malheureux que celui qui ne sait pas chanter (proverbe égyptien)
...
Pouvoir encore regarder,
pouvoir
encore écouter,
Et
surtout pouvoir chanter
Que
c'est beau, c'est beau la vie... (Jean Ferrat)
Yên Hà, Décembre 2012
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